4 : La technologie numérique transforme le commerce
Matières
- Introduction
- 1 : Forte ou faible croissance
- 2 : La technologie numérique transforme la production et la main-d’œuvre
- 3 : La technologie numérique transforme la consommation
- 4 : La technologie numérique transforme le commerce
- 5 : La technologie numérique transforme la nature de la propriété et les attentes en ce qui a trait à la création de valeur
- 6 : Les technologies numériques se répercutent sur le comportement des marchés financiers
- 7 : La technologie numérique brouille la fonction interprétative des principaux indicateurs macroéconomiques
- 8 : Les technologies numériques ont des répercussions sur les données officielles et les instruments de la politique macroéconomique
- Remerciements
La technologie numérique transforme le commerce
Les derniers progrès des technologies numériques, en particulier l’impression 3D, l’intelligence artificielle, l’Internet des objets et la robotique, pourraient se répercuter sur les flux commerciaux et le produit intérieur brut (PIB) en permettant une croissance de la production locale et mondiale. Par exemple, comme les biens et services sont produits à la demande et dans des marchés localisés, les exportateurs nets actuels pourraient connaître une baisse des exportations. Inversement, les importateurs nets actuels pourraient être en mesure de produire davantage de biens et services dans leurs propres administrations. En ce qui concerne la collaboration internationale, les accords commerciaux évoluent afin d’inclure des éléments numériques clés tels que la localisation et le stockage de données. La technologie numérique continue d’informer les négociations commerciales à venir.
De la production de masse à la personnalisation
Traditionnellement, les entreprises ont adhéré à des modèles classiques de prix/quantité, visant à abaisser les coûts afin de livrer plus de biens à plus de consommateurs. Pendant des décennies, les contraintes sur le pouvoir d’achat dans le monde développé ont exercé une pression sur les entreprises afin qu’elles trouvent plus de moyens de réduire les coûts pour livrer la marchandise. Jusqu’à présent, les entreprises ont répondu à la demande de la consommation de masse à l’aide de complexes chaînes d’approvisionnement mondiales afin de maintenir une production de masse au rabais et à grand volume. Ces chaînes d’approvisionnement nécessitaient également une expédition et un entreposage de masse.
En se tournant vers l’avenir, les technologies numériques telles que l’impression 3D, l’intelligence artificielle, l’Internet des objets et les robots, pourraient faciliter une production de masse des biens et services bon marché, locale et à la demande. Ces biens et services, qui pourraient être créés à plus petite échelle, pourraient être adaptés aux demandes personnalisées d’un marché plus petit et plus localisé. Les algorithmes peuvent optimiser la conception et l’approvisionnement d’entrée de n’importe où dans le monde, en fonction des objectifs en matière de prix et de rendement. Parallèlement, l’impression 3D soutient de plus en plus la production presque instantanée au point de consommation ou près de ce dernier. Les commandes sur mesure et produits personnalisés deviennent possibles à des prix de production de masse.
L’expansion de ce nouveau modèle pourrait changer le flux des échanges commerciaux. Ces dernières années, la concurrence a raccourci la durée des contrats de chaînes d’approvisionnement pour le commerce de la plupart des marchandises. Maintenant, les technologies numériques les rendront encore plus fluides en augmentant les options et la concurrence à l’échelle mondiale, tout en diminuant la taille des lots par contrat.
Relocalisation des biens et services
Relocalisation/délocalisation intérieure (Oxford Dictionary)
La pratique de ramener dans le pays d’origine les activités d’une entreprise qui avaient été transférées à l’étranger.
« La relocalisation peut nous aider à rééquilibrer notre économie, à créer de nouveaux emplois et à réduire notre déficit commercial. »
Les scénarios futurs de relocalisation des biens et services pourraient accroître la production nationale pour les administrations qui en sont le bénéficiaire net ou réduire la production nationale pour celles qui en sont le bienfaiteur net. Des facteurs tels que la géopolitique, une pandémie, les phénomènes climatiques extrêmes et la hausse des salaires dans des administrations précédemment à bas salaires, pourraient favoriser la production locale de biens physiques malgré les réseaux mondiaux. La relocalisation pourrait avoir le même effet que la délocalisation a déjà eu : les régions vers lesquelles l’activité économique est transférée ont historiquement augmenté leur production et leur consommation, ce qui ajoute à la demande mondiale mesurée par le PIB. Par exemple, l’importation accrue de voitures japonaises à bas prix au Canada et aux États-Unis dans les années 1970 a réduit la part de marché des trois Grands constructeurs de véhicules automobiles en Amérique du Nord. Le PIB mondial s’est tout de même accru, grâce à l’augmentation de la consommation au Japon. L’adoption à grande échelle de plateformes et de la téléprésence en ligne pourrait diminuer cet effet. Elle pourrait permettre à de nombreux aspects de la production relocalisée de se poursuivre à l’extérieur du pays. Seule une petite quantité de travail serait nécessaire au point de production final.
Nouveaux produits et services
La technologie numérique permet aux nouveaux produits et services créés et à ceux qui sont existants d’être commercialisés à l’échelle mondiale. Des produits supplémentaires sur le marché ne garantissent pas une demande globale plus importante, telle que mesurée par le PIB. Cela est dû au fait qu’un nouveau produit ou service, tel que Netflix et d’autres services de divertissement sur demande, peut remplacer un service plus coûteux qui est consommé à grande échelle, tel que la câblodistribution. Dans les scénarios où de nouvelles technologies remplacent des produits et services plus anciens et plus coûteux, le PIB pourrait, en fait, diminuer. Dans les scénarios où l’économie de coûts est utilisée pour acheter d’autres biens et services, il pourrait y avoir une croissance nette.
L’effet de remplacer des produits et services traditionnels plus coûteux par de nouveaux produits moins chers, p. ex., un service de divertissement sur demande, pourrait avoir une plus grande incidence sur les marchés développés comme le Canada que sur les marchés émergents. On présume que le marché émergent a précédemment moins consommé du produit ou service original. Autrement dit, le marché pourrait tout simplement passer à la nouvelle technologie sans jamais avoir utilisé l’ancienne, comme c’est le cas pour les téléphones cellulaires en Afrique. Les marchés émergents percevront probablement les dépenses engagées en technologies numériques comme des ajouts nets aux dépenses, par exemple, plutôt que comme des remplacements.
Accords commerciaux
Les accords de « libre-échange » incluent explicitement et protègent la propriété intellectuelle (PI) et la propriété des données qui définissent la trajectoire du développement économique. La PI façonne le potentiel économique et social du monde entier. L’accès aux médicaments antirétroviraux brevetés pour traiter le VIH/sida, par exemple, a été intégré à l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce de 1994. Dans ce cas, les protections de la PI ont finalement été outrepassées1. Au fur et à mesure que les économies et les sociétés deviennent de plus en plus axées sur les données, et que davantage de processus et de plateformes deviennent brevetés, les économies émergentes et développées seront toutes deux confrontées à de multiples défis. Elles auront besoin d’obtenir l’accès aux données générées collectivement par la consommation et l’utilisation d’une vaste gamme de biens et services numériques pour développer la vie publique, ainsi que les marchés2.
Localisation des données et ACEUM
Une nouvelle disposition de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) empêche le Mexique, les États-Unis et le Canada d’imposer des exigences en matière de localisation de données.
La loi sur la localisation ou résidence des données exige que les données concernant les citoyens ou résidents d’une nation soient recueillies, traitées et stockées à l’intérieur de leur pays. Les exigences en matière de localisation de données, qui existaient auparavant au Canada et qui demeurent en vigueur en Nouvelle-Écosse et en Colombie-Britannique, limitent la possibilité de flux transfrontalier de données en empêchant qu’elles quittent les centres de données locaux pour aller vers, par exemple, l’infonuagique.
C’est important pour les fournisseurs du commerce électronique international qui, par exemple, doivent souvent transférer des données commerciales et sur les clients au-delà des frontières pour faire le suivi des commandes et produits3.
Notes en fin de texte
1 Nicol, Dianne et Olasupo Owoeye. « Using TRIPS Flexibilities to Facilitate Access to Medicines ». Bulletin de l’Organisation mondiale de la Santé 91 (18 avril 2013) : p. 533 à 539. https://www.who.int/bulletin/volumes/91/7/12-115865/en/
2 Curiak, Dan et Maria Ptashinka. « Leveraging the Digital Transformation for Development: A Global South Strategy for the Data-driven Economy ». CIGI Policy Brief 148 (3 avril 2019). https://www.cigionline.org/publications/leveraging-digital-transformation-development-global-south-strategy-data-driven.
3 Shah, Agam et Jared Council. « USMCA Formalizes Free Flow of Data, Other Tech Issues ». Wall Street Journal, 29 janvier 2020. https://www.wsj.com/articles/cios-businesses-to-benefit-from-new-trade-deal-11580340128.