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Le Canada et le changement de la nature du travail

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PDF: Le Canada et le changement de la nature du travail

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Résumé
Un nouveau contexte
Perspectives
Scénarios
Défis et possibilités
Conclusion
Annexe A : Hypothèses
Références

Résumé

L’une des caractéristiques les plus perturbatrices de l’économie numérique en émergence est l’essor des travailleurs virtuels. Des plateformes de travail virtuel (p. ex., http://freelancer.com) permettent à des travailleurs individuels d’annoncer leurs compétences et de trouver des contrats à court terme auprès d’employeurs du monde entier – ce qui crée un marché numérique mondial de main-d’œuvre. On estime que 48 millions de travailleurs étaient inscrits sur des plateformes de travail en ligne à l’échelle mondiale en 2013.1 On estime également que le marché augmentera de 33 % annuellement, et on s’attend à ce que le nombre de travailleurs atteigne 112 millions et le revenu du marché 4,8 milliards de dollars américains en 2015.2 La progression du travail virtuel pourrait profondément changer la nature du travail au Canada, transformant la façon dont le travail est réalisé, le moment où il est réalisé, le lieu où il se réalise et le type même du travail réalisé. Cette nouvelle forme de travail pourrait ensuite remettre en question les fondements de la politique sociale et des programmes du Canada comme l’assurance-emploi et le Régime de pensions du Canada.

Perspectives : Qu’est-ce qui change?

  • Le travail devient virtuel : Le travail virtuel prend de l’ampleur à une vitesse exponentielle et est susceptible de faire partie de l’expérience de travail de la plupart des Canadiens d’ici 2030.
  • Le travail traverse de plus en plus les frontières : Le travail virtuel est possible pour toute personne qui possède une connexion à Internet et un téléphone intelligent ou une tablette pour exécuter du travail peu spécialisé ou hautement spécialisé au sein de chaînes de valeur de plus en plus numériques.
  • Le travail devient flexible, mais incertain : Un marché en ligne mondial augmentera le travail autonome et les contrats à court terme, rendant la sécurité d’emploi et la sécurité financière plus difficiles à atteindre.

Questions émergentes : À mesure que les perspectives interagissent, quels défis pourraient se présenter?

  • La croissance du travail virtuel permettra aux travailleurs qualifiés de trouver plus facilement du travail en ligne et exposera les Canadiens à la concurrence et aux débouchés mondiaux.
  • Le travail virtuel pourrait entraîner une convergence mondiale des salaires pour les tâches similaires, réduisant potentiellement le salaire des Canadiens avec le temps. Une collaboration transnationale pourrait être requise pour éviter une baisse des salaires mondiale et pour élaborer des instruments stratégiques sociaux efficaces pour cet espace de travail virtuel international.
  • Le travail virtuel remettra en question les cadres juridiques et réglementaires existants, comme ceux liés au salaire minimum, à la discrimination et à la perception des impôts.
  • L’accès aux programmes sociaux pourrait devoir être séparé du statut d’emploi si l’emploi à temps plein cesse d’être la norme.

Le travail virtuel pourrait réclamer des solutions nouvelles et créatives, à l’image de certaines des initiatives stratégiques sociales passées les plus ambitieuses du Canada. Il faudra probablement suivre une démarche transformative plutôt qu’évolutive pour s’adpater au changement de la nature du travail et à tout ce que cela implique pour le filet social du Canada.

Un nouveau contexte

Horizons de politiques Canada a exploré, lors d’études précédentes telles que MetaScan 3, comment l’influence des technologies numériques façonnera le monde que nous connaissons. L’introduction de plateformes Web en ligne ainsi que d’autres technologies clés comme la téléprésence virtuelle, l’analyse de données, la robotique, l’intelligence artificielle, les capteurs et l’impression 3D entraînent une cascade de changements qui transforment la façon dont le travail est réalisé, le moment où il est réalisé, le lieu où il se réalise et le type même du travail réalisé. Le travail façonne nos vies depuis longtemps, fournissant un moyen de subsistance, un sens, un but, une identité et des avantages sociaux aux individus et aux familles. Il a aussi été ancré dans le système de sécurité sociale du Canada, d’abord comme source pour les normes du travail, les programmes d’accès au marché du travail et l’assurance-emploi, et ensuite comme moyen de financer les régimes de retraite et les transferts sociaux financés par les impôts. Par conséquent, l’évolution du travail aura beaucoup de conséquences sur les individus et la société canadienne. Cette étude prospective explore certains des aspects les plus perturbateurs, plus particulièrement en ce qui trait au travail virtuel, et la façon dont ils influenceront la sécurité sociale dans le futur.

« La sécurité sociale est un ensemble de mesures visant l’amélioration ou la protection du capital humain qui s’étend des interventions sur le marché du travail, au régime public de chômage ou à l’assurance-vieillesse en passant par le soutien du revenu ciblé. Les interventions liées à la sécurité sociale aident les individus, les ménages et les collectivités à mieux gérer les risques liés au revenu qui rendent les personnes vulnérables. »
– La Banque mondiale, citée dans le document de travail de l’Institute of Development Studies (IDS) 232 intitulé « Transformative Social Protection » (en anglais seulement), par Stephen Devereux et Rachel Sabates-Wheeler, 2004.

Un certain nombre de forces convergentes pourraient accélérer la montée du travail virtuel dans les 10 à 15 prochaines années. Des investissements et les progrès actuels dans l’infrastructure rendent l’accès de qualité à Internet possible presque partout, diminuant les obstacles à la participation en ligne à l’échelle mondiale. Un effort pour réduire les coûts continue de stimuler la recherche d’économies dans les secteurs privé et public. Le « dégroupement » du travail, où des projets complexes sont réduits à leurs parties constitutives et où ces parties sont attribuées sous forme de contrats à des travailleurs occasionnels en ligne, est une façon de diminuer les coûts et d’obtenir des gains opérationnels (figure 1). Des modèles d’emploi plus souples seront attirants pour les entreprises qui gèrent des besoins en compétences en pleine évolution reliés à des changements technologiques rapides. Les taux de travail autonome sont aussi en augmentation. Même s’il est clairement lié au chômage et qu’il représente peut-être la seule option pour certains, le travail autonome est de plus en plus favorable pour toute une gamme de compétences.3 L’insistance de la génération du millénaire sur la satisfaction au travail, la liberté et l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle signifie probablement que ces travailleurs optent pour le travail autonome et un type différent de carrière, en partie par choix.4

Figure 1: Dégroupage de l’écosystème – Progression future des travaux

Dégroupage de l'écosystème - Progression future des travaux

Cette image illustre les 9 étapes du « Dégroupage de l’écosystème – Progression future des travaux ».

Perspectives

Les perspectives décrivent les avancées actuelles qui pourraient créer des changements supplémentaires hautement perturbateurs dans le futur si elles se renforçaient. Les perspectives sont sélectionnées en fonction de leur potentiel perturbateur et de leurs conséquences pour les politiques.

L’expansion du travail virtuel : du bureau au Web

La production participative de microtravail et les marchés de travail à la pige en ligne

Les plateformes de travail en ligne qui offrent un marché mondial pour les échanges de main-d’œuvre sont une partie en croissance rapide de l’économie numérique, reliant les clients5 (en général des entreprises) aux travailleurs à la pige de partout dans le monde. Les plateformes permettent aux entreprises de « dégrouper » les projets complexes en plus petites unités6 (figure 1) pouvant ensuite être distribuées mondialement par l’Internet à un bassin de main-d’œuvre sur demande, ce qui minimise les coûts. Elles permettent aux travailleurs autonomes d’avoir accès à un marché mondial de clients, augmentant possiblement leurs chances de trouver du travail flexible et payé. Il existe plus de 145 de ces plateformes,7 présentant une offre très diversifiée, des généralistes (p. ex., UpWork, Freelancer) qui réalisent des projets et des tâches, aux « travailleurs du clic (télé-travailleurs indépendants) »8 qui effectuent des microtâches dans le nuage (p. ex., Amazon Mechanical Turk, Crowdflower) (figure 2). On estime que 48 millions de travailleurs étaient inscrits sur ces sites à l’échelle mondiale en 2013 et qu’environ 4,8 millions d’entre eux étaient actifs.9 Même s’il s’agit d’une faible part (estimée à moins de 1 % de la population active au Canada10 et aux États-Unis11), le marché croît rapidement. On s’attend à atteindre 112 millions de travailleurs et un revenu de marché de 4,8 milliards de dollars en 2015, engendrant ainsi une croissance annuelle de 33 %.12 D’ici 2020, le revenu du marché pourrait s’élever à 46 milliards de dollars américains.13 ; Freelancer prévoit avoir 1 milliard d’utilisateurs dans 10 ans,14 alors qu’UpWork anticipe que le revenu annuel total des pigistes en ligne passera d’un milliard à 10 milliards de dollars américains dans les six prochaines années.15 Les marchés en lignes pour des services physiques (comme Uber, Homejoy, TaskRabbit) et le placement de personnel sont aussi en croissance (figure 3). McKinsey estime que d’ici 2025, ces types de plateforme, ensemble,16 pourraient produire un PIB mondial de 2,7 trillions de dollars, augmenter l’emploi de 72 millions d’équivalents temps plein et bénéficier à 540 millions de personnes.17

Travail à la pige en ligne

  • Upwork (9 millions de pigistes)
  • Freelancer (16 millions de pigistes)
  • Hourly Nerd (plus de
  • 10 000 diplômés détenant une maîtrise en administration des affaires d’une école supérieure)
  • Proz (766 603 traducteurs)
  • Fiverr (plus de 3 millions de services)

Microtravail participatif

  • Amazon Mechanical Turk (332 519 tâches de veille humaine)
  • Cloudflower (5 millions de collaborateurs)

Le développement du microtravail participatif et de plateformes de travail à la pige en ligne en tant que modèle de travail en est à ses premières étapes. Si la trajectoire de croissance des plateformes numériques dans le commerce électronique (Amazon, eBay)18 et le sociofinancement, lequel devrait représenter en 2015 un montant supérieur au capital de risque,19 sont des indicateurs, alors le potentiel de croissance de ce secteur est énorme. En plus des facteurs mentionnés plus haut, la prolifération des mégadonnées est susceptible de créer un besoin supplémentaire de collecte, de nettoyage, d’extraction et de regroupement des données, nourrissant la demande de microtravail.20 Même si la demande actuelle pour le microtravail et le travail à la pige en ligne provient du secteur privé, elle a aussi le potentiel de grandir dans le secteur public, alors que des gouvernements aux États-Unis et en Europe font déjà des expériences de sociofinancement.21 D’ici 2030, il est possible qu’un grand nombre (peut-être même la majorité) de Canadiens obtiennent au moins une partie de leur revenu du travail virtuel.

Figure 3: Croissance estimée du nombre de travailleurs inscrits à la plateforme de travail en ligne (en millions)

Croissance estimée du nombre de travailleurs inscrits à la plateforme de travail en ligne (en millions)

Cette image illustre un graphique à barres illustrant la « Croissance estimée du nombre de travailleurs inscrits à la plateforme de travail en ligne (en millions). »

Mondes virtuels en ligne

Les mondes virtuels, comme Second Life, sont un autre type de travail virtuel qui pourrait prendre de l’expansion dans les 10 à 15 prochaines années. Dans ces mondes en ligne, les utilisateurs interagissent à l’aide d’avatars pour produire des activités, des divertissements et des échanges économiques semblables à la vie réelle. Certaines des plus grandes compagnies (p. ex., IBM, Accenture), des plus grandes entreprises de recrutement (p. ex., Randstad, Manpower), des plus importantes sociétés d’avocats et d’autres entreprises (autant réelles que virtuelles) du monde ont utilisé Second Life dans le cadre de leurs activités.22Grâce à Second Life, des travailleurs ont également réussi à faire valoir leurs droits, et le gouvernement des États-Unis a légiféré sur la situation des travailleurs virtuels.23 Même s’ils ont d’abord fait leur apparition comme nouveau lieu de travail au milieu des années 2000, les mondes virtuels offrent toujours un lieu de rencontre pour la collaboration mondiale en temps réel. Grâce à une réalité améliorée, aux avancements des graphiques et à la tendance croissante du télétravail, ils pourraient réapparaître à titre de centre mondial du travail et du commerce.

D’autres types de travail virtuel comprennent les services de jeux tiers, où quelqu’un est embauché pour jouer à un jeu en ligne en vue d’augmenter la puissance ou le statut d’un joueur, ou pour obtenir de l’argent ou des biens virtuels (qui peuvent être échangés pour de l’argent du monde réel), et le travail de marketing en ligne, comme les « j’aime » sur Facebook.

Tout est dans le nuage

  • Services de jeux en ligne (World of Warcraft)
  • Vente de biens et services dans le monde virtuel (Second Life)
  • Microtravail (Amazon Mechanical Turk)

Obtenu en ligne

  • Travail à la pige en ligne (Upwork, Freelancer) : Réalisé sur un appareil local, rendu en ligne
  • Services sur demande (Uber, TaskRabbit) : Réalisé et rendu hors ligne
  • Gestion des talents en ligne (LinkedIn) : Emplois traditionnels présentés en ligne
  • Le monde virtuel comme lieu de travail (Second Life) : Emplois traditionnels réalisés en ligne

Un rééquilibrage mondial des salaires

Entre aujourd’hui et 2030, des milliards de travailleurs compétents et connectés au Web de partout dans le monde pourraient passer au travail virtuel. La rapidité croissante d’Internet et la maturation des espaces de travail virtuels, les téléphones intelligents peu dispendieux et la connectivité sans fil permettront à des personnes défavorisées de participer à l’économie mondiale à titre de travailleur virtuel.24 L’accès au travail de n’importe quel endroit dans le monde sera facilité par la traduction automatisée de haute qualité fournie par l’intelligence artificielle (IA).25 Les avancements de la téléprésence ouvriront l’accès à de tout nouveaux genres d’emplois de type service qui pourront être exécutés par des travailleurs virtuels, et les avancées de la télérobotique du travail virtuel trouveront leurs applications dans les tâches physiques. Même pour les tâches de service qui sembleraient demander une présence sur place, les robots équipés de bras agiles pourraient changer la donne dans des secteurs aussi variés que la chirurgie26, les mines27 et l’entretien ménager28. Beaucoup de pays pourraient avoir un avantage sur le plan des salaires par rapport à l’Occident, et ces avancées pourraient étendre la concurrence mondiale à un éventail beaucoup plus vaste de professions. Cette situation pourrait entraîner une convergence mondiale des salaires pour du travail semblable, diminuant le revenu des Canadiens au fil du temps et augmentant davantage la pénurie d’emplois causée par l’adoption de l’IA et de la robotique.

La première grève virtuelle du monde (pour en savoir plus, consulter le  Winifred Poster – en anglais seulement)

En 2007, lorsque les employés italiens de l’entreprise internationale IBM ont dû faire face à une réduction de salaire inattendue, ils ont organisé une manifestation dans le monde virtuel Second Life pour exprimer leur mécontentement. Leur grève au siège social virtuel d’IBM comportait près de 2 000 avatars de grévistes de 30 pays. Leur manifestation virtuelle a entraîné la démission de l’homme responsable de la réduction des salaires, et ils ont obtenu les conditions salariales de la vie réelle qu’ils recherchaient.

https://www.youtube.com/watch?v=dja5rlSGo0s
(vidéo : 6 minutes – en anglais seulement)

Sécurité d’emploi incertaine

Un marché en croissance29 pour le travail en ligne pourrait faire du travail autonome la forme dominante de travail au Canada et conduire à une sécurité d’emploi incertaine potentielle pour bon nombre de Canadiens. Les possibilités de travail à la pige en ligne pourraient diminuer les barrières à l’entrée pour beaucoup d’entrepreneurs potentiels, leur permettant de démarrer leur propre petite entreprise avec peu de capital. Cela habiliterait beaucoup de personnes et leur donnerait plus de choix et de flexibilité (figure 5). Un marché en ligne pourrait aussi faciliter une association plus efficace des compétences et réduire le temps passé sans emploi.30 D’un autre côté, un modèle de travail à la pige en ligne modifie la relation traditionnelle entre les employeurs et les employés,31transformant les travailleurs – même ceux qui réalisent beaucoup de petites tâches pour un client – en entrepreneurs indépendants. Avec le dégroupement des emplois, une grande partie du travail à la pige pourrait se concrétiser par des tâches de durée plus courte pour un salaire moins élevé.32 À moins que d’autres sources novatrices de sécurité d’emploi apparaissent, à mesure que de plus en plus d’emplois deviennent virtuels, les travailleurs pourraient ne plus bénéficier d’un approvisionnement prévisible de travail, d’un salaire régulier et suffisant, d’avantages comme un régime de retraite, d’un cheminement d’avancement de carrière et d’accès aux programmes actuels de sécurité du revenu comme l’assurance-emploi. Le dégroupement du travail et sa migration vers l’espace virtuel pourraient de cette façon accroître la vulnérabilité des Canadiens, contribuant à la montée grandissante des « travailleurs précaires ».

Figure 5: Plus de choix et de flexibilité

Plus de choix et de flexibilité

Cette image s’intitule « Plus de choix et de flexibilité » et met en évidence les avantages et les inconvénients associés au travail indépendant.

L’exploitation dans un monde virtuel sauvage

Le travail virtuel transfère le travail d’un environnement réglementé à un environnement non réglementé où la législation actuelle sur le travail ne s’applique pas nécessairement.33 Les plateformes ont des normes très différentes, et plusieurs de celles-ci créent des situations gagnant-gagnant pour les clients et les travailleurs. Toutefois, ce manque de réglementation dans l’espace de travail virtuel risque de créer un déséquilibre entre les clients et les pigistes.34 Sur certaines plateformes, les clients ont peu d’obligations envers les travailleurs à qui ils donnent des contrats : ils n’offrent aucun avantage social, ne sont pas toujours tenus de divulguer le contexte du travail demandé et ne sont parfois même pas obligés de payer pour le travail réalisé (figure 6).35 Les procédures de recours pour les travailleurs qui sont traités injustement dans le cyberespace sont aussi limitées à l’heure actuelle. Hors des frontières de la relation entre l’employeur et l’employé, la législation sur le travail qui établit les normes concernant le salaire minimum, les heures de travail et les conditions de travail ne s’appliquent plus.36 Le potentiel d’exploitation le plus flagrant se retrouve sur le marché des microtâches, où certains travailleurs de plateformes n’ont aucun moyen de négocier avec les clients au sujet du travail numérique qu’ils effectuent. Des sondages auprès des travailleurs d’Amazon Mechanical Turk indiquent que pour 18 % d’entre eux, la rémunération qu’ils reçoivent est parfois, ou toujours, nécessaire pour joindre les deux bouts,37 même si le salaire moyen est de moins de deux dollars l’heure.38 Sur n’importe quelle plateforme, avec un clic, les clients peuvent choisir quelqu’un d’autre et aller là où la main-d’œuvre est la moins dispendieuse et où la réglementation est la moins sévère.39 Même si des éléments indiquent que certains de ces problèmes pourraient être réglés dans le futur, par exemple par l’entremise de cas en instance40 ou d’initiatives entreprises par la plateforme elle-même,41 les marchés en ligne pourraient créer de la pression pour réduire les droits du travail, autant en ligne que hors ligne. Lors d’un ralentissement économique, les plateformes pourraient offrir aux entreprises une opportunité de profiter des travailleurs. Pour ces raisons, sans nouveaux mécanismes en place, le travail virtuel émergent à l’échelle mondiale risque d’éroder les victoires du passé en matière de salaire et de droits du travail.

Pourquoi n’avez-vous pas été payé pour le travail virtuel accompli?

  • Vous avez réalisé le travail en respectant les spécifications et votre travail n’a pas été choisi – 99Designs
  • Le client a rejeté votre travail (mais pourrait tout de même l’utiliser) – Amazon Mechanical Turk
  • Vous ne pouvez pas trouver de travail – Vous avez une excellente réputation, mais les travailleurs de l’Inde sont trop concurrentiels parce qu’ils se contentent d’un salaire inférieur – Toutes les plateformes
  • Quelqu’un a injustement entaché votre réputation et vous ne pouvez plus revenir en arrière – Toutes les plateformes

Syndicalisation collective parmi les travailleurs virtuels : la renégociation d’échanges équitables

La croissance du travail virtuel déclenche la renégociation de ce qui constitue un échange équitable pour le travail. Même si l’économie numérique change beaucoup d’aspects du travail, les aspirations des travailleurs pourraient ne pas changer autant (figure 7). Certains travailleurs des plateformes ont affirmé qu’ils ne voulaient pas que leur plateforme soit réglementée, mais les manifestations et les campagnes des travailleurs pour un traitement plus équitable4243 indiquent un désir de changement. Les employés de Gawker ont voté pour une syndicalisation en juin 2015, s’établissant ainsi comme la première publication numérique aux États-Unis où une telle volonté s’exprimait, et une vague d’autres entreprises ont suivi (Salon, Vice, Guardian U.S. et Al Jazeera U.S.)44, ce qui illustre que la syndicalisation des travailleurs numériques pourrait être possible.45 Une volonté nationale de syndiquer les travailleurs des médias numériques aux États-Unis46 et un appel pour la syndicalisation transnationale des travailleurs numériques47 visent à démontrer ce point encore davantage, malgré les difficultés liées à la syndicalisation d’une main-d’œuvre dispersée possédant une expérience variée du travail virtuel. D’autres formes de soutien mutuel pour les travailleurs sont aussi en émergence. Celles-ci comprennent les moyens de contournement pour les logiciels48 et les forums49 visant la protection des travailleurs contre les clients sans scrupules, les sites Web pour les campagnes de travailleurs,50 un nombre grandissant d’espaces partagés de travail appartenant aux travailleurs51et des organisations comme la Freelancers Union (syndicat des pigistes) aux États-Unis, une association de travailleurs à la pige qui prend la défense des droits de ses membres et leur offre une assurance médicale et dentaire.5253 La façon dont cette défense des travailleurs numériques se déroule aura des conséquences importantes sur le bien-être des travailleurs canadiens et sur leur degré de recours aux programmes sociaux. Les renégociations pourraient rappeler le mouvement ouvrier du 20e siècle et influencer plusieurs aspects du travail virtuel dans l’économie numérique.

Les travailleurs numériques aimeraient profiter des avantages d’un emploi traditionnel 

Dans un sondage auprès de travailleurs d’Amazon Mechanical Turk qui leur demandait ce qui pourrait améliorer leur expérience, ils ont indiqué :

  • Salaire minimum
  • Mécanisme de résolution des conflits
  • Voix collective des travailleurs
  • Plus de contrôle lors de non-paiement, entre autres facteurs

Source : http://wtf.tw/ref/felstiner.pdf (pp. 167/168 – en anglais seulement)

Dans un sondage auprès de travailleurs de l’économie sur demande, les souhaits les plus importants concernant le lieu de travail étaient :

  • Assurance-maladie payée
  • Prestations de retraite
  • Congé payé lors des jours fériés, des vacances et des jours de maladie
  • Les travailleurs étaient aussi intéressés aux occasions de promotion, d’études, d’assurance invalidité et de soutien des ressources humaines.

Source : http://www.sfgate.com/business/article/Worker-survey

Intégration entre le travail et la vie personnelle

La montée du travail virtuel change la façon dont le travail est effectué, le moment où il est effectué et le lieu où il peut être pratiqué; le travail virtuel réduit également la séparation entre le travail et la vie personnelle et change les cheminements de carrière qui ont donné forme à la vie des Canadiens. Le déplacement du travail sur le Web signifie qu’on peut travailler de presque n’importe où, en tout temps. De plus en plus de personnes peuvent maintenant travailler de leur domicile ou d’un autre endroit de leur choix, ce qui augmente l’accès au travail pour les groupes dont les possibilités ont pu être limitées dans le passé (p. ex., travailleurs à distance) et pour ceux qui ont besoin de travailler à temps partiel (p. ex., les parents à la maison).54 Cela permet aussi de commencer à travailler plus tôt (emplois de jeu en ligne à temps partiel pour les adolescents) et de travailler plus longtemps (les personnes âgées qui ont besoin d’un revenu supplémentaire); il est également possible pour presque n’importe qui de passer des périodes de temps libre en réalisant des activités produisant un revenu. Selon le point de vue de la productivité, c’est un grand avantage. Toutefois, cela soulève aussi la question de l’intensification du travail. Des études initiales ont donné un avis partagé concernant la combinaison entre le travail et la vie personnelle des personnes qui font du travail virtuel.55 Les travailleurs ont rapporté se sentir isolés, mais indiquent aussi des taux de satisfaction plus élevés.56 De nouvelles configurations entre le travail et la vie personnelle pourraient demander des mesures de soutien différentes pour répondre aux besoins psychosociaux des travailleurs (p. ex., le besoin de sens, de but, d’identité) et pour créer une voie plus fluide tout au long des étapes de la vie (p. ex., congés sabbatiques périodiques plutôt qu’une longue retraite). Le travail virtuel donne à beaucoup de personnes une occasion de se réinventer, mais il est difficile de dire qui seront les gagnants et les perdants dans ce nouvel environnement.

Scénarios

Des scénarios sont utilisés pour visualiser la façon dont le futur pourrait évoluer en fonction de différents facteurs et de différentes conditions. Les scénarios ne sont pas des tentatives de prédiction du futur, mais visent plutôt l’exploration de ce à quoi pourrait ressembler le futur, afin de mettre à l’essai les hypothèses et les approches politiques potentielles actuelles par rapport à différentes solutions de rechange.

Scénario 1 : Ensemble disparate de mesures (avancer à tâtons)

Tentatives inefficaces par le gouvernement

À mesure que les sociétés soucieuses des coûts adoptent les plateformes de travail virtuel, les gouvernements sont mis au défi d’ajuster leurs programmes et règlements en conséquence. Un ensemble disparate de règlements découle d’une réponse précipitée, menant à des cadres politiques nationaux inefficaces comportant peu de réussites. Les lignes directrices périmées concernant l’admissibilité et les nouvelles réalités laissent beaucoup de personnes sans filet de sécurité sociale.

La société peine à suivre le mouvement

Des moyens de contournement de toutes sortes deviennent pratique courante parmi les travailleurs devant avoir un esprit d’entrepreneuriat de plus en plus fort. Des niveaux plus élevés d’insécurité d’emploi et de travail précaire mènent à un revenu général plus faible et à une iniquité grandissante. Les personnes ayant des compétences très recherchées s’en sortent très bien, mais pour la majorité des travailleurs virtuels les perspectives sont médiocres, ces derniers ne pouvant pas compter sur un travail à temps plein régulier. Les tentatives de syndicalisation sont en général trop peu nombreuses pour être globalement efficaces.

Adaptation du secteur privé

Les plateformes gérées font leur apparition dans une tentative de dupliquer certains aspects de la culture du travail traditionnel pour fournir aux employés un but, les mettre au défi, leur offrir un cheminement de carrière et une bonne relation avec leurs collègues. Certaines entreprises mettent au point leur propre plateforme interne d’attribution de contrats, même si la plupart se basent sur un bassin global de plateformes d’attribution de contrats. La plupart des pigistes doivent constamment chercher des contrats et apprendre la sous-traitance, pour construire leur propre réseau. Les options du secteur privé en ce qui concerne les avantages sociaux et les protections sociales se multiplient pour ceux qui peuvent se les permettre.

Scénario 2 : Course vers le bas (déclin graduel)

Rater le coche de la collaboration mondiale

Les tentatives de coopération mondiale pour aborder les problèmes en émergence reliés au travail virtuel ont échoué. Le déclin a commencé lorsque des travailleurs de partout dans le monde se sont fait concurrence pour offrir la soumission la moins élevée afin d’obtenir un contrat en ligne. Les salaires moins élevés et les difficultés liées aux impôts prélevés pour le travail virtuel causent le sous-financement des programmes sociaux de certains pays.

Sociétés imposantes

Quelques entreprises sont propriétaires de la majorité des plateformes de travail virtuel et ont un haut niveau d’influence sur les salaires et les normes du travail, ce qui entraîne une exploitation plus répandue des travailleurs. Les tentatives pour mettre en place un type de bureau de la concurrence demeurent plus ou moins inefficaces. Ce n’est pas tout le monde qui se fait payer en argent. Certains sont payés en crédits échangeables dans le magasin virtuel de l’entreprise.

Transparence à sens unique

Les mégadonnées et la surveillance des travailleurs permettent aux employeurs de surveiller le rendement des travailleurs. Les travailleurs veulent davantage de transparence en ce qui a trait à la gestion des systèmes liés à la réputation qui déterminent leurs perspectives de travail. Une hiérarchie claire des plateformes se met en place. Le statut et la prospérité sont déterminés par les plateformes auxquelles les travailleurs ont accès, et cela est relié aux marqueurs sociaux (ethnicité, sexe, citoyenneté). Les tentatives d’entrée dans les plateformes bloquées à l’aide de moyens de contournement technologiques sont difficiles en raison d’une surveillance intensive. La syndicalisation des travailleurs est lente parce qu’une participation à une telle syndicalisation menace de mettre en danger la possibilité de faire valoir ses compétences en ligne.

Scénario 3 : Réponse coordonnée (transformation)

Les travailleurs virtuels se syndiquent

Les inégalités de plus en plus grandes en matière de revenu sont de plus en plus palpables. L’inaction des gouvernements motive un grand nombre de travailleurs virtuels à se mobiliser à l’aide des médias sociaux. Un mouvement ouvrier de prochaine génération émerge et il réussit à stimuler une réponse coordonnée entre les gouvernements, le secteur privé et les travailleurs.

Une réponse mondiale visionnaire

Une coalition de pays, de sociétés virtuelles, de plateformes de travail virtuel et de syndicats innovateurs convient graduellement des éléments essentiels d’un nouveau cadre politique mondial pour réduire l’exploitation des travailleurs, assurer un salaire équitable et éviter une dégradation des conditions. Des efforts importants sont réalisés pour recalibrer les normes du travail internationales et réinventer les programmes de politique sociale nationale pour les coordonner au niveau mondial. Dans certains cas, les cotisations et le calcul des prestations sont gérés et transmis par voie numérique à l’aide de nouvelles plateformes mondiales multipartites. Des réseaux de surveillance internationale par des tiers appliquent les nouvelles normes. Pour beaucoup de travailleurs possédant des compétences moyennes dans les pays développés, il s’agit d’une descente vers le milieu plutôt que vers le fond. Plusieurs gouvernements et certaines plateformes aident les travailleurs à apprendre de nouvelles compétences pour accéder à des positions plus élevées dans la chaîne de valeur. Les gouvernements nationaux qui parviennent réinterprètent les dynamiques régionales, nationales et internationales pour aider leurs travailleurs et entreprises à s’adapter aux nouvelles réalités.

Responsible actors

Des outils de suivi numérique permettent aux travailleurs, aux consommateurs et aux entreprises de faire le suivi des causes et des effets de leurs choix effectués dans la chaîne d’approvisionnement numérique mondiale. La responsabilité sociale d’entreprise devient étroitement liée aux profits, à la pénétration du marché et aux pratiques commerciales durables. Les sociétés et les pigistes collaborent avec les gouvernements pour appliquer de nouveaux modèles d’imposition. Même si l’évasion et les moyens de contournement existent toujours, la transparence réduit les avantages pour ceux qui essaient de détourner le système.

Défis et possibilités

Les réponses politiques au monde émergent du travail devront être faites en tenant compte des intérêts fondamentaux des Canadiens, en établissant des protections des travailleurs sans délaisser le potentiel novateur du travail virtuel. Même si la situation actuelle soulève beaucoup de préoccupations du point de vue de la protection sociale, elle offre aussi la possibilité de réinventer le travail pour mieux répondre aux buts politiques sociaux. Les réponses pourraient : 1) s’attaquer à l’expansion du système existant pour mieux gérer l’ère du travail en émergence, 2) traiter de sa transformation.”57 Johal, Sunil and Noah Zon. 2015. “Policymaking for the Sharing Economy: Beyond Whack-A-Mole.” Mowat Centre. February 16, 2015.” on page 19  Une réponse optimale traitera de la détermination proactive des écarts entre les politiques et des possibilités qui se profilent et entraînera une réflexion sur le rôle du gouvernement vis-à-vis des nouveaux modèles de travail.

Être en avance sur les tribunaux : Transformer le cadre juridique et réglementaire

Bon nombre des aspects du travail virtuel remettront en question le cadre juridique et réglementaire existant du Canada par rapport à l’emploi, y compris la législation sur le travail, les normes de l’emploi, la santé et la sécurité au travail et l’équité en matière d’emploi. Certains problèmes sont susceptibles de se retrouver devant les tribunaux, comme aux États-Unis, où il y a 15 instances en cours pour déterminer si les travailleurs virtuels sont des employés ou des entrepreneurs indépendants.”58 Toutefois, les tribunaux sont limités par le cadre juridique et réglementaire existant qu’ils doivent appliquer et leurs décisions pourraient par inadvertance endiguer les modèles émergents, allant ainsi à l’encontre du but recherché. Le monde émergent du travail pourrait bénéficier davantage d’une restructuration des cadres existants et de certaines nouvelles solutions créatives pour l’avenir. Par exemple, plusieurs pays discutent des relations d’emploi ambiguës et certains ont pris des mesures afin de rendre l’assurance-emploi plus facile d’accès pour les travailleurs occasionnels.59 L’Union européenne discute d’une troisième catégorie de travailleurs, le « travailleur économiquement dépendant », qui est officiellement un travailleur autonome, mais qui dépend d’un seul employeur pour son travail et son revenu. Ces discussions sont faciles à transférer aux situations de travail virtuel. La création de catégories supplémentaires de travailleurs pourrait faire en sorte que certains des travailleurs virtuels les plus vulnérables puissent profiter des protections sociales; des catégories supplémentaires permettraient également de retirer un revenu fiscal de ce flux. On servirait probablement davantage les Canadiens en utilisant ce type de solution novatrice qu’en étirant un cadre peu adapté à travers un ensemble disparate de décisions de la cour.

Éviter une course vers le bas : Assurer un salaire juste et suffisant

L’une des plus grandes incertitudes au sujet du monde en émergence du travail virtuel est la mesure dans laquelle les travailleurs y obtiendront un salaire juste et suffisant. Certaines plateformes de travail virtuel mettent volontairement en place un niveau de paiement minimal.60 L’autoréglementation est intrinsèquement changeante, mais indique réellement des points d’appui potentiels pour une intervention gouvernementale. Toutefois, bon nombre de difficultés sont reliées à la réglementation du salaire minimum pour le travail à la pige en ligne, et des solutions assez différentes pourraient devoir être explorées pour assurer la sécurité du revenu. Un revenu minimal plutôt qu’un salaire minimal est une de ces propositions, qui obtient de plus en plus de soutien dans beaucoup de pays, de la part de partis politiques de gauche et de droite.61 Même si cela demandait du travail, y compris pour le mécanisme de financement, un revenu minimal pourrait aussi aider à réduire l’impact du chômage découlant de la technologie qui renforce encore davantage l’inégalité.

Tirer parti des possibilités d’intégration du marché du travail

McKinsey croit que les plateformes d’association du talent en ligne réduiront la nécessité d’avoir recours à des programmes relatifs au marché du travail du gouvernement, puisqu’elles faciliteront une association plus efficace et réduiront les périodes durant lesquelles les personnes ne travaillent pas.62 Le travail virtuel offre aussi la possibilité d’améliorer l’accès au travail des personnes marginalisées (qui sont handicapées ou qui vivent en région éloignée), et d’aider les personnes à retourner sur le marché du travail ou à développer leur employabilité grâce à des compétences nouvelles et variées. C’est l’une des raisons pour lesquelles le travail virtuel est actuellement exploré de manière active par des organisations comme la Banque mondiale et la Fondation Rockfeller en tant qu’outil de développement.63 Toutefois, il faudra aussi trouver comment soutenir les personnes pour leur permettre de progresser au sein du système de travail virtuel et d’obtenir des contrats plus gratifiants. Cela ne demandera pas simplement une amélioration des compétences, comme dans le passé. Il s’agirait plutôt d’apprendre comment faire valoir ses compétences de manière efficace en ligne et comment développer une valeur sur ce marché en ligne (réputation, marque).

Appuyer l’« emploipreneur » et la « micromultinationale » : de la certification à la réputation

Dans une économie numérique automatisée, les travailleurs du Canada devront agir de manière entrepreneuriale pour trouver du travail, en étant concurrentiels à titre d’« emploipreneurs » et de « micromultinationales ». Les petites entreprises en démarrage, la gestion et la promotion des compétences seront importantes, ainsi que la capacité à inventer son propre travail pour combler de nouvelles niches sur le marché. En même temps, le dégroupement « déprofessionnalisera » certaines professions et abaissera le niveau de compétences requis pour réaliser bon nombre d’emplois à mesure que l’importance de la réputation en ligne grandira. Par conséquent, les Canadiens pourraient avoir besoin de moins de certifications et de plus de réputation pour renforcer leur position internationale sur ce marché du travail. Une des compétences clés se traduira par la gestion de sa propre présence sur le Web, y compris de sa réputation et de sa marque personnelle. La réputation sera établie à un niveau individuel sur un marché international du travail, et le Canada pourrait aussi avoir l’opportunité d’établir une réputation internationale dans certains segments du marché. Les campagnes d’établissement de marque internationales pourraient stimuler l’avantage concurrentiel des Canadiens sur un marché du travail mondial.

Protéger la réputation personnelle

À mesure que la réputation devient la méthode principale pour obtenir du travail, la nécessité de réglementer les systèmes de réputation par un tiers pourrait se présenter. Comme sur TripAdvisor ou beaucoup d’autres sites en ligne, des évaluations négatives sur une plateforme de travail virtuelle peuvent être fatales.64Actuellement, l’une des façons par lesquelles la plupart des marchés de travail en ligne conservent les utilisateurs sur leurs plateformes est par l’intermédiaire de leurs propres systèmes privés d’évaluation de la qualification et de la réputation.65 Toutefois, les travailleurs publicisent de plus en plus leurs évaluations de la réputation à l’extérieur des plateformes de travail virtuel (p. ex., LinkedIn),66 ce qui suggère la possibilité d’évaluations de la réputation portables pour le futur. Puisque des évaluations négatives pourraient dramatiquement nuire aux travailleurs dans la hiérarchie de travail en ligne, ou même les priver de travail, la réputation deviendra une question de politique sociale. L’équivalent d’un bureau de crédit pour la surveillance de la réputation pourrait être nécessaire, avec un moyen de recours pour les personnes qui croient avoir été lésées de façon importante.

La coordination d’une approche internationale de la protection sociale

Un des défis continus sera l’application des protections sociales dans un espace virtuel international. Walmart, une entreprise qui est régulièrement interpelée pour ses pratiques d’exploitation aux États-Unis,67 est une bonne entreprise citoyenne sur la plateforme Samasource, où elle offre du travail à des personnes défavorisées du Kenya.68 Cela met en évidence la différence que la géographie peut faire en définissant le bon travail ou la réglementation juste. Les politiques propres à un pays seront aussi difficiles à mettre en application à l’aide d’instruments traditionnels dans un environnement numérique, où plusieurs moyens de contournement sont possibles. Malgré les difficultés, plusieurs mesures pourraient se révéler véritablement efficaces à l’aide d’une coordination internationale. Une coopération transnationale est possible en ce qui concerne des questions comme les salaires équitables et même la sécurité sociale. Par exemple, les plateformes dont le mandat comprend le perfectionnement de leurs travailleurs ont volontairement mis en place un salaire minimal qui est ajusté en fonction du salaire vital de chaque pays.69 Wagemark70 est une autre initiative volontaire internationale qui permet aux entreprises de se présenter comme une entreprise respectant certaines normes du travail. Ces types d’initiatives pourraient être encouragées ou même rendues obligatoires à l’échelle mondiale dans le futur. D’autres mesures qui pourraient être considérées sont les régimes mondiaux d’assurance sociale réglementés par des institutions nationales71 et le soutien de la syndicalisation internationale.

Mise à jour des programmes de sécurité sociale

La nouvelle réalité du travail posera un défi indéniable relativement aux impacts d’un dégroupement involontaire des mesures de sécurité du revenu, comme l’assurance-emploi et les régimes de retraite liés à l’emploi. Au Canada, les politiques sociales s’appuient sur la prémisse selon laquelle l’emploi est la norme et le chômage, l’exception. Mais un marché du travail mondial et une économie automatisée laissent entrevoir un avenir où les emplois seront potentiellement plus précaires et moins nombreux. Cette réalité limiterait la fonction de redistribution du travail (moins de personnes ayant accès au revenu marchand par le truchement d’un emploi), ainsi que l’accès aux avantages financés par le gouvernement ou l’employeur et traditionnellement liés aux emplois (congés de maladie, régimes supplémentaires d’assurance-maladie et d’invalidité, assurance-emploi, perfectionnement des compétences, congés parentaux et régimes de retraite). Ces changements pourraient obliger le Canada à revoir la façon dont il finance et fournit ses avantages sociaux. L’élaboration d’un système d’avantages portatifs qui peuvent suivre les travailleurs d’un contrat à l’autre et qui protègent aussi les travailleurs autonomes pourrait être essentielle. Un groupe aux États-Unis défend activement cette approche.72 Joindre les avantages sociaux à la citoyenneté73 ou encourager et prendre en charge des initiatives citoyennes comme l’assurance fournie par la Freelancers Union aux États-Unis sont des possibilités.

Distribution des risques et des responsabilités entre les entreprises, les travailleurs et l’État

Le système de sécurité sociale du Canada distribue actuellement les risques entre les employeurs, les employés et l’État, qui doivent tous assumer une partie de la responsabilité financière liée aux mesures d’assurance sociale. (Les employeurs et les travailleurs sous la forme de prélèvements obligatoires liés à l’emploi et l’État sous la forme de transferts sociaux.) Dans les configurations du travail en émergence de l’économie numérique, les entreprises réaliseront des économies importantes grâce au travail virtuel et à la robotique, mais se déchargeront de leurs responsabilités financières à l’égard des travailleurs sur l’État et les travailleurs eux-mêmes. Les individus devront faire les frais de leurs périodes de maladie et des lésions professionnelles (p. ex., microtraumatismes répétés), ce qui entraînera des coûts pour la société sous la forme d’un fardeau de soins de santé et de perte de productivité. L’État portera le fardeau du chômage et du sous-emploi. Même dans un système qui fonctionne de façon optimale, la prolifération des pigistes transférera une partie des coûts au système de sécurité sociale. Un revenu général potentiellement moins élevé et un taux plus élevé de chômage constitueraient une charge supplémentaire sous la forme d’impôts sur le revenu grandement réduits et de besoins de transfert social plus élevés. Le défi est donc de trouver comment redistribuer ce risque et rééquilibrer les rôles entre les entreprises, les travailleurs et l’État. Une possibilité serait de nouvelles formes d’imposition aux entreprises d’une certaine taille, comme sur leurs systèmes de robotique, la quantité de bande passante qu’ils utilisent ou le nombre de transactions financières réalisées. Par exemple, la France explore de nouvelles options d’imposition pour d’autres aspects de l’économie numérique.74 La taxe à la consommation, comme la taxe de luxe, la « sainte taxe » et les frais imposés à l’utilisateur plutôt que les impôts sur le revenu sont une autre possibilité.

Conclusion

À mesure que le Canada fait son chemin dans l’économie numérique en émergence et dans le nouveau monde du travail virtuel, il doit tenir compte de plusieurs éléments. Certains des changements explorés dans cette étude remettent en question les hypothèses existantes au sujet du travail et dérangent les hypothèses sur la politique sociale en place depuis longtemps (annexe A). Un avenir de travail sans frontières en ligne où la majorité des personnes sont des pigistes indépendants apportera sans doute des difficultés et, à l’inverse, des perspectives inattendues. Certains aspects seront positifs. Par exemple, la participation des Canadiens (petites et moyennes entreprises et individus) aux chaînes de valeur numériques mondiales pourrait ouvrir la voie à de nouvelles perspectives commerciales et libérer un nouveau niveau de dynamisme entrepreneurial au Canada. D’autres aspects seront plus difficiles. Par exemple, que se passe-t-il lorsqu’un emploi ne représente plus la meilleure politique sociale, une garantie de stabilité et de bien-être? Le changement pourrait être graduel, mais aussi rapide, surprenant et perturbateur, augmentant potentiellement la vulnérabilité de beaucoup de personnes. Le Canada a maintenant une occasion d’anticiper et de planifier ces possibilités, de façon à faire en sorte que le travail virtuel soit réalisé dans l’intérêt primordial des Canadiens.

Annexe A : Hypothèses

Cette étude prospective remet en question les hypothèses actuelles sur l’avenir attendu du travail. Elle propose des hypothèses de rechange susceptibles d’être plus solides dans une série de scénarios futurs que les hypothèses actuelles.

Hypothèses Hypothèses solides
La plupart des emplois du Canada demeureront essentiellement inchangés en nombre et en nature. Les emplois changeront dramatiquement en nombre et en nature, avec moins d’emplois à temps plein et plus de travailleurs virtuels dans un marché du travail mondial de plus en plus complexe.
Le Canada dispose d’un filet de sécurité sociale flexible et complet, même s’il peut devoir être étiré dans le futur. Les formes changeantes de l’emploi remettront en question la flexibilité et l’exhaustivité de la sécurité sociale du Canada. La sécurité sociale devra peut-être évoluer de manière importante pour répondre aux besoins futurs.
Le Canada a un système de protection du travail solide pour traiter les questions comme le salaire minimum et la discrimination. Le système actuel de protection du travail du Canada pourrait offrir une couverture limitée dans un monde de travail virtuel international.
Les syndicats sont en déclin et appartiennent à l’ère du travail industriel. La syndicalisation est pertinente pour les travailleurs virtuels et l’ère numérique, mais devra probablement s’adapter et se développer sous de nouvelles formes.
Le relèvement des compétences mène à des emplois meilleurs et plus rémunérateurs / les études et la formation sont les clés de la mobilité sociale. Une combinaison plus variée de nouvelles compétences et de différents types de titres de compétences, ainsi qu’une marque personnelle forte et des capacités de promotion personnelle pourraient être nécessaires pour réussir dans le marché en émergence du travail virtuel mondial.
Un emploi est la meilleure politique sociale. Dans un monde où l’emploi est précaire, les emplois pourraient ne pas suffire pour permettre aux Canadiens de ne pas se retrouver en situation de pauvreté et de vulnérabilité. Le Canada devra songer à renouveler ses modèles de politiques sociales visant la répartition du revenu marchand et des avantages sociaux traditionnellement liés aux emplois.

Références

1 Kuek, S. et al. 2015. “The global opportunity in online outsourcing.” World Bank Group. June 2015.

2 Ibid.

3 Frey, Carl Benedikt and Michael A. Osborne. 2013. “The future of employment: how susceptible are jobs to computerisation?”  The Oxford Martin School. September 17, 2013.

4 Chamorro-Premuzic, Tomas. 2014. “Why millennials want to work for themselves.” Fast Company. August 13, 2014.

5 Dans cette étude, nous avons choisi d’appeler ceux qui paient pour de la main-d’œuvre dans l’économie virtuelle « clients » plutôt qu’« employeurs », en reconnaissance de la dissolution de la relation entre les employeurs et les employés. « Travailleur » est un terme plus souvent utilisé qui se substitue facilement à « employé ».

6 Le monde du travail a déjà franchi la première étape du dégroupement des emplois (la perspective d’une longue carrière et d’un emploi à temps plein est peu à peu supplantée par la réalité des emplois contractuels et à temps partiel).

7 Kuek, S et coll. Cette figure date de 2013, et puisque des plateformes sont créées chaque jour, les chiffres sont probablement inférieurs à la réalité.

8 Aussi appelés microtravailleurs, crowd workers et travailleurs du nuage.

9 Ibid.

10 Ipeirotis, P., personal communication, June 2015.

11 Kuek. S. et al.

12 Ibid.

13 Staffing Industry Analysts cited in Kuek, S et al.

14 “15 million lives changed.” Freelancer. p. 9. June 2015.

15 “Elance-oDesk relaunches as Upwork, debuts new freelance talent platform.” Upwork. May 5, 2015.

16 Manyika, J. et al. 2015. “Connecting talent with opportunity in the digital age.” McKinsey and Company. June 2015.

Les estimations de McKinsey concernent à la fois les plateformes de travail à la pige en ligne (p. ex., Upwork), les plateformes de services sur demande (p. ex., Uber) et les plateformes de gestion des talents (p. ex., Monster, LinkedIn, PayScale).

17 Ibid.

18 Ibid.

19 Global crowdfunding market to reach $34.4 B in 2015, predicts massolution’s 2015CF industry report. Crowdsourcing.org.

20 Kuek, S. et al.

21 Ibid.

22 See Second Life web siteSecond Life: Business, and Linden Lab’s infographic: 10 years of Second Life for more information.

23 Cherry, M. Alabama Law Review. Working for virtually minimum wage. In June 2008 the U.S. IRS ruled that greeters for the Electronic Sheep Company in Second Life were employees, as opposed to independent contractors.

24 For example, see Samasource and Cloudfactory.

25 Par exemple, les services de traduction gratuite déjà fournis par Skype et Google. La qualité de la traduction par l’IA est déjà remarquable et est susceptible d’être presque parfaite d’ici 2030.

26 Eveleth, Rose. 2014. “The surgeon who operates from 400km away.” BBC Future. May 16, 2014

27 Snyder, Jessie. 2015. “How the ‘rise of the machines’ will transform oil and gas.” Alberta Oil Magazine. March 16, 2015.

28 “Will remote-controlled robots clean you out of a job?” New Scientist. December 3, 2014.

29 Sauf indication contraire, dans la suite de cette étude, les références concernant les marchés en ligne et à la pige comprennent le microtravail ainsi que le travail à la pige.

30 Mankyika, J. et al.

31 Un débat est en cours à savoir si les microtravailleurs des nuages doivent être considérés comme des entrepreneurs ou des employés. Ils sont actuellement traités comme des entrepreneurs dans presque tous les cas.

32 Les microtâches peuvent prendre aussi peu que quelques secondes, et payer aussi peu que quelques cents. Une étude a démontré que le salaire moyen des travailleurs d’Amazon Mechanical Turk était de 1,25 $ US, à un moment où le salaire minimal fédéral des États-Unis était de 7,25 $ US/heure.

Felstiner, Alek. 2011. “Working the crowd: employment and labor law in the crowdsourcing industry.” Berkeley Journal of Employment and Labor Law. p. 167.

33 Les décisions judiciaires en sont à leurs premières étapes. Par exemple, en juin 2008, l’I.R.S. (Internal Revenue Service) des États-Unis a déterminé que les accompagnateurs pour l’Electronic Sheep Company dans Second Life étaient des employés, et non des entrepreneurs indépendants. En juin 2015, la Californie a déterminé que les conducteurs d’Uber étaient des employés plutôt que des entrepreneurs. Beaucoup d’autres cas sont devant les tribunaux aux États-Unis.

34 Silberman, M. 2014. “Designs for a future microtask market.” May 9, 2014.

35 Par exemple, sur Amazon Mechanical Turk, les clients peuvent refuser de payer les travailleurs sans fournir de justification, mais tout de même utiliser et conserver la propriété du travail.

36 Howcroft, Debra and Birgitta Bergvall-Kareborn. 2014. “Internet provides new threat to employment rights.” Manchester Policy Blogs. December 9, 2014.

Les normes du travail existantes ne sont pour la plupart pas appliquées. L’entente de participation des travailleurs d’Amazon Mechanical Turk énonce explicitement que « … les travailleurs n’ont pas droit à l’indemnité de vacances, au congé de maladie, à l’assurance-maladie ou à la rémunération en cas de blessure. Les modalités n’offrent aucune protection sociale aux travailleurs et aucun engagement n’est pris pour respecter le salaire minimum. »

37  Ross, J. 2010. “Who are the Turkers? Worker Demographics in Amazon Mechanical Turk.”

38 Ipeirotis and Ross cited in Felstiner, A. 2011. “Working the Crowd: Employment and Labor Law in the Crowdsourcing Industry.” Berkeley Journal of Employment and Labor Law, Vol. 32, No. 1. August 16, 2011.

39 L’énoncé suivant de Lucas Biewald, cofondateur et PDG de l’une des plateformes de microtravail les plus importantes, donne une idée du caractère remplaçable des travailleurs dans cet environnement de travail : « Avant Internet, il aurait été très difficile de trouver quelqu’un, de le convaincre de s’asseoir pendant dix minutes et de travailler pour vous, puis de le licencier après ces dix minutes. Mais avec la technologie, vous pouvez réellement trouver des personnes pour le faire, leur donner un tout petit montant d’argent, puis vous en débarrasser lorsque vous n’avez plus besoin d’eux. »

Biewald, Lucas (Co-founder and CEO of Crowdflower microwork platform) cited in Marvit, Moshe Z. February 5, 2014. “How Crowdworkers became the ghosts in the digital machine.” The Nation.

40 Les décisions judiciaires en sont à leurs premières étapes. Par exemple, en juin 2008, l’I.R.S. (Internal Revenue Service) des États-Unis a déterminé que les accompagnateurs pour l’Electronic Sheep Company dans Second Life étaient des employés, et non des entrepreneurs indépendants. En juin 2015, la Californie a déterminé que les conducteurs d’Uber étaient des employés plutôt que des entrepreneurs. Beaucoup d’autres cas sont devant les tribunaux aux États-Unis.

41 Par exemple, Upwork a mis en place des stratégies pour éviter que son marché en ligne soit inondé de travailleurs à faible coût (communication personnelle, septembre 2015).

42 For example, see the Amazon Mechanical Turk worker letter writing campaign to Amazon CEO Jeff Bezos.

43 For example, see the No!Spec campaign against spec work.

44 Vasquez, Mario. 2015. “Wave of digital media organizing continues as Al Jazeera America goes union. In These Times. October 6, 2015.

45 Lehmann, Chris. 2015. “Digital-media workers of the world, unite!” Aljazeera America. June 14, 2015.

46 Sterne, Peter. 2015. “Reporters announce conference in Louisville to unionize digital media.” Politico New York. June 8, 2015.

47 “Crowdsourcing grows up as online workers unite.” New Scientist. February 6, 2013.

48 Par exemple, Turkopticon (en anglais seulement) est un programme que les travailleurs peuvent utiliser avec Amazon Mechanical Turk pour identifier et éviter les clients qui ne paient pas pour le travail accompli.

49 cloudmebaby.com (en anglais seulement) est un forum pour les travailleurs à clic qui peuvent partager des trucs et des conseils, par exemple, comment améliorer les cotes de réputation et faire de l’argent plus efficacement.

50 Par exemple, consulter Coworker.org (en anglais seulement).

51 Cowork Niagara (en anglais seulement) à St. Catharines en Ontario, « où les pigistes, les entrepreneurs sociaux et les groupes sans but lucratif travaillent, collaborent et produisent des choses incroyables ensemble. »

52 Voir le site Web de la Freelancers Union (en anglais seulement).

53 Whitney, Heather. “Alternative Forms of Labor Organizations: Union Substitutes or Something Else?” Digital Labor.

54 Ipeirotis, Panos. “The New Demographics of Mechanical Turk.” A Computer Scientist in a Business School blog. March 9, 2010.

Environ 65 % des travailleurs d’Amazon Mechanical Turks sont des femmes, et on estime que cela est dû au fait que plus de femmes ont besoin d’un travail flexible à temps partiel qu’elles peuvent harmoniser avec les soins qu’elles apportent à leurs enfants.

55 Mandl, Irene. “New forms of employment: Status quo and first findings on crowd employment and ICT based, mobile work.” European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions. March 28, 2014.

56 Mandl, Irene. “New forms of employment: Status quo and first findings on crowd employment and ICT based, mobile work.” European Foundation for the Improvement of Living and Working Conditions. March 28, 2014.

57 Johal, Sunil and Noah Zon. 2015. “Policymaking for the Sharing Economy: Beyond Whack-A-Mole.” Mowat Centre. February 16, 2015.

58 Cherry, M., personal communication. June 2015.

59 International Labour Organization. “World Employment and Social Outlook.” May 19, 2015.

60 “Crowdsourcing grows up as online workers unite.” New Scientist. February 6, 2013.

61 See:

•    Coyne, Andrew. 2015. “Guarantee a minimum income, not a minimum wage.” National Post. June 10, 2015.
•    Gordon, Noah. 2014. “The Conservative Case for Guaranteed Basic Income.” The Atlantic. August 6, 2014.
•    Basic Income web site.

62 Manyika, J. et al

63 See for example the World Bank study on online outsourcing referenced widely in this report and an earlier study, “Knowledge Map of the Virtual Economy.”

64 Stewart, James. “Online work exchanges and the ‘crowdsourcing’ labour.” Joint Research Centre – European Commission.

65 Ibid

66 Ibid

67 A list of anti-Walmart and pro-Walmart sites can be viewed on Reclaim Democracy web site.

68 Samasource. Customer Case Study: Walmart

69 Par exemple, MobileWorks établit le salaire minimum de ses travailleurs selon le coût de la vie des pays où ils travaillent.

70 Voir www.wagemark.org (en anglais seulement)

71 Murphy, Susan and Patrick Paul Walsh. 2014. “Social Protection Beyond the Bottom Billion.” The Economic and Social Review. Summer 2014.

72 “Common ground for independent workers.” Portable Benefits. November 9, 2015.

73 Comme dans le cas de notre système de soins de santé ou la garantie d’un revenu de base proposée à l’échelle internationale.

74 Collin, Pierre and Nicolas Colin. “Task Force on Taxation of the Digital Economy.” Ministere de l’economie et des finance and Ministere du redressement productif. Government of France. Jaunary 2013.

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Policy Horizons | Horizons de politiques

Horizons de politiques Canada, également connu sous le nom de Horizons de politiques, est une organisation au sein de la fonction publique fédérale qui mène des activités de prospectives stratégiques sur des enjeux transectoriels qui informent les fonctionnaires sur les conséquences des politiques publiques possibles au cours des 10 à 15 prochaines années.

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