Émergence d’une société avertie
PDF: Émergence d’une société avertie
Sur cette page
Introduction
Une réalité riche en information
Moteurs de changement
Que peuvent offrir ces progrès?
Technologies émergentes
Récit
Impacts sociaux
Conclusion
Introduction
La quantité de données créées chaque seconde croît rapidement produisant un vaste océan d’information. Pour permettre aux gens de décoder cette réalité riche en information, de nouvelles technologies sont développées. Internet a déjà changé les sociétés du monde, mais les quinze prochaines années pourraient être encore plus transformatrices.
Une réalité riche en information
Chaque jour, il y a plus d’internautes. Ils découvrent de nouveaux sites, de nouvelles applications et de nouvelles activités en ligne. Le rendement des appareils est amélioré. Les plateformes offrent plus d’espace de stockage. Les utilisateurs désirent ou ont besoin d’une connexion plus rapide. L’arrivée d’Internet des objets (IdO) permet maintenant à des objets autonomes de contribuer à la circulation de l’information. Au cours des prochaines décennies, des données sur presque tous les aspects mesurables de la planète et de ses habitants pourront être disponibles en temps réel. Une nouvelle génération de technologies émergentes nous aidera à naviguer dans ce nouvel océan d’information, à sélectionner, à percevoir et à interagir, de façons qui pourraient transformer l’expérience et les relations humaines. L’information et la communication seront au cœur même de nos vies. Nos centres urbains seront dotés d’ordinateurs et deviendront réactifs, capables de conjurer de l’information et d’obéir à nos commandes.
- À quoi cette nouvelle Société avertie pourra-t-elle bien ressembler?
- Quelles seront ses incidences sur les personnes et la société?
- Dans quelle mesure la vie privée, les normes sociales, les perceptions, l’éducation et les relations seront-elles transformées?
Moteurs de changement
Explosion de l’information
Le téléphone intelligent a changé la donne. L’information est désormais actuelle, abondante et accessible. Aujourd’hui, en quelques instants, l’on crée plus d’information que toute celle écrite de l’aube de l’humanité au début de l’ère de l’information. Nous sommes passés des nouvelles quotidiennes aux nouvelles matinales et de soirée, puis aux fils d’actualité minute par minute. L’information sera bientôt vraiment fournie en temps réel. Lire chaque jour tout le journal local est possible; la totalité du contenu mondial est si vaste que personne ne pourrait l’assimiler.
Notre rapport avec l’information évolue rapidement. Plusieurs ont maintenant l’habitude d’entendre leur mobile siffler à la réception de nouveaux contenus. L’avènement des flux personnels a poussé de nombreuses personnes à créer leur propre flux de contenu. Les algorithmes de recherche, les réseaux sociaux, les agrégateurs, les analyses de données et l’Intelligence artificielle sont de plus en plus indispensables pour donner un sens à toute l’information disponible. Parcourir l’information sur Internet sera de moins en moins une entreprise manuelle.
Croisement des progrès technologiques
Les nouvelles technologies, opérant de concert avec Internet, transforment la société. Le résultat de toutes ces avancées technologiques pourrait être une expérience plus fluide, intuitive et immersive avec nos dispositifs et applications numériques.
Ces progrès technologiques sont les suivants :
- Une intelligence artificielle pratique et abordable
- De nouvelles méthodes d’affichage numérique : réalité virtuelle et réalité augmentée
- Une technologie alliant sens tactiles et expérience numérique appelée haptique
- Interface cerveau-ordinateur : dispositifs permettant aux utilisateurs d’interagir avec les ordinateurs en utilisant leur pensée
- Internet des objets : intégration des capacités d’Internet et de l’informatique dans tous les objets
- La migration des tâches de calcul des appareils individuels vers des ordinateurs centraux, appelée informatique en nuage
- Des dispositifs capables de gérer plusieurs connexions Internet afin de bénéficier d’une connexion Internet dynamique plus rapide et moins chère
Que peuvent offrir ces progrès?
Réalité augmentée – Immergez-vous
Cette réalité mixte fera disparaître les écrans, intégrant menus, documents et avatars aux espaces physiques, transformant parfois même les environnements en des scènes fantastiques ou éloignées.
Les dispositifs de réalité virtuelle (RV) et de réalité augmentée (RA) pourront éventuellement être fusionnés et offrir ainsi à chacun un seul flux de leurs mondes virtuel et physique.
Assistance personnelle – Déléguez
Ceux qui se convertiront entièrement à l’intelligence artificielle (IA) pourront enseigner à leur agent IA comment leur faciliter la vie et prévoir leurs besoins. Le temps que l’on ne consacre pas aux tâches actuelles est source de nouvelles possibilités et révélateur d’un nouveau rythme de vie.
Les assistants personnels abordables seront disponibles bientôt sous la forme d’agents dotés d’intelligence artificielle (IA). Les applis munies d’une IA acquerront une autonomie partielle, de l’autocoordination et un certain esprit d’initiative, au bénéfice de leur propriétaire.
Interfaces utilisateur conviviales – Le monde à votre commande
En l’absence d’écrans et de claviers, la frontière entre les appareils numériques et le monde physique disparaît. Le milieu urbain devient une interface interactive intuitive.
Les dispositifs haptiques et les interfaces cerveau-ordinateur amélioreront les interactions numériques, réduisant le temps de commande ou de lecture d’information. Les environnements urbains prendront vie, grâce aux périphériques formant un Internet des objets (IdO). Pièces, bâtiments et villes seront capables de recueillir et de communiquer de l’information, écouter des commandes et exécuter des tâches de concert avec d’innombrables appareils connectés.
Une véritable mobilité – Partout à la fois
Présence et téléprésence seront presque indifférenciables. Notre rapport à la géographie et aux lieux en sera transformé.
Grâce à l’informatique en nuage et aux vitesses de connexion prochaine-génération, les appareils portables personnels tireront parti de la puissance de superordinateurs centraux permettant aux gens d’être plus productifs partout, en tout temps.
Technologies émergentes
Figure 1 – La technologie est en train de transformer notre rapport à l’information
Récit
Une existence accompagnée
2030, vivre dans une Société avertie
Sarah est née en 2005 et a maintenant 25 ans. Elle a vécu toute sa vie avec Internet et toute sa vie de jeune adulte en compagnie d’une intelligence artificielle (IA) personnelle. Le progiciel intégré à l’IA agit comme son assistant personnel, médiatisant ses interactions avec un large éventail de technologies. AIAp (agent IA personnel) lui fournit un flux continu de suggestions et de rappels pour l’aider à digérer des montagnes d’information. En plus d’aIAp, Sarah navigue dans une réalité augmentée, lui permettant de vivre continuellement dans le monde réel et le monde numérique en même temps.
« Je suis toujours connectée, même quand je dors. C’est normal. » – Sarah
Un matin entre amis
Chaque matin, aIAp réveille Sarah au moment optimal en fonction de son cycle du sommeil et de son horaire. AIAp ajuste son horaire pour éviter les retards du métro, tirer parti de nouvelles occasions d’affaires ou finir son boulot plus tôt afin d’être prête pour une fête en soirée. Au réveil de Sarah, son interface-utilisateur démarre et commence à lui présenter de l’information pendant qu’elle se prépare. Elle discute avec ses parents via l’appli sociale d’un de ses appareils portables personnels. Sa mère est dans la cuisine et son père, en voyage d’affaires, est dans sa chambre d’hôtel. La conversation se fait naturellement, en continu, pendant qu’ils suivent leur routine matinale. Les dispositifs facilitent la conversation, s’exécutent automatiquement en arrière-plan sans aucune instruction.
Sarah s’assoit à la table de la cuisine. Elle est « rejointe » par son père et certains de ses amis qui apparaissent et disparaissent lorsqu’ils se joignent ou quittent la conversation. L’expérience se passe comme dans une cafétéria virtuelle où Sarah peut choisir d’être accompagnée par des amis holographiques ou rejoindre d’autres dans un monde virtuel.
Productive partout avec tous
Suivant les instructions de son horaire, elle se dirige à la rencontre de ses camarades de classe sur le campus. Sarah est étudiante et designer indépendante. Elle travaille habituellement avec ses clients et ses camarades par téléprésence, mais aime encore beaucoup rencontrer ses collègues. Dans le métro léger, Sarah fait de la lecture, travaille sur un fichier 3D pour un projet, imprime le fichier au laboratoire du campus, confirme des réunions de travail pour la journée et planifie sa soirée.
Au campus, Sarah et ses collègues s’attaquent à la matière de la journée en convoquant des professeurs locaux et des experts du campus à l’étranger. Étudiant la théorie du design, Sarah met en pratique ce qu’elle apprend. Ses outils lui permettent de créer des objets réels, de les numériser, de les modifier, de collaborer à distance et de réimprimer ces objets en 3D. Les étudiants sont encouragés à commercialiser leurs travaux à l’aide de plateformes web pour pigistes et à explorer comment ils peuvent être transformés en produits physiques ou numériques.
Vie optimisée
Après le dîner, Sarah fait son exercice d’après-midi. AIAp surveille ce qu’elle mange, la quantité d’activité physique qu’elle fait et plusieurs autres données afin de la conseiller à prendre des décisions plus saines. Son assureur récompense ses décisions intelligentes. Avec son groupe d’amis, elle participe à des jeux compétitifs sains et amusants. Elle marche rapidement sur le campus pendant qu’elle parle à d’autres entrepreneurs afin de voir s’ils pourraient collaborer à la création de nouveaux produits pour obtenir de petits contrats. AIAp lui fournit des conseils pour optimiser son temps, ses occasions d’apprentissage et ses profits.
Personnalités numériques partitionnées
Durant toutes ces activités, Sarah a également dû traiter un flux constant d’information organisée, de messages personnels d’amis et de publications de personnalités médiatiques. Sarah est très présente en ligne, où elle gère avec soin différentes marques personnelles. Elle se sert de son principal avatar public pour interagir avec des marques d’entreprise, différentes collectivités et le monde en général. Pour un groupe restreint, elle partage en pleine transparence et avec honnêteté. Sur d’autres plateformes, elle présente projets et ambitions sur un portfolio professionnel.
AIAp informe Sarah de la façon dont toutes ses actions peuvent être connues par les autres. Des services de confidentialité l’aident à protéger son intimité tout en la laissant libre de s’exprimer selon ses propres conditions. Des services d’image de marque l’aident à exploiter sa personnalité numérique. Sarah partage certains renseignements afin de profiter d’une expérience personnalisée avec une variété d’entreprises, de restaurants et d’événements. Puisque l’IA et les réseaux sociaux permettent à Sarah et à ses amis de faire des comparaisons et d’envisager des milliers de possibilités, leurs attentes sont ultra élevées. L’accès aux activités des entreprises et à l’origine des produits leur permet de faire coïncider leurs achats et leurs valeurs et de partager leurs expériences au sein de collectivités aux vues similaires.
Définir son propre rythme
Connectée en permanence, Sarah contrôle son expérience sociale. Son rapport à l’information lui permet de prendre des décisions éclairées. Bien qu’il lui arrive de demander de l’information spécifique ou de manière spontanée, les renseignements lui sont la plupart du temps présentés par aIAp. Ce flot d’information peut parfois être déroutant. Sarah prend des vacances du flot, désactive certains de ses appareils et se concentre sur ses pensées intérieures. Elle utilise souvent la réalité virtuelle pour se transporter dans une forêt apaisante, ou éteint presque toutes ses applis sociales pour lire un livre. Recevoir presque toutes les informations pertinentes pour prendre des décisions quotidiennes et ne jamais oublier offre des avantages, mais peut être épuisant.
Impacts sociaux
La vie privée dans un monde transparent
Une transparence accrue transformera la dimension publique, obligeant la société à revoir le droit à la vie privée.
Toujours plus de capteurs et de caméras tapissent nos paysages urbains. Les mégadonnées, la reconnaissance faciale, l’apprentissage profond et l’externalisation ouverte pourraient sonner la fin de la vie privée. De nombreux utilisateurs de téléphones intelligents transmettent des données personnelles sans en avoir conscience. Cependant, la plupart du temps, les citoyens sont prêts à renoncer à leur vie privée pour profiter des nombreux services qu’offre la nouvelle transparence. Certaines études suggèrent qu’on ne prise pas la vie privée autant qu’on le prétend. Le mouvement de la quantification de soi et l’extraction de la réalité créent des données à la seconde sur la plupart des aspects de la vie personnelle. À mesure que l’Internet des objets (IdO) se développera, presque tous les services et produits chercheront à exploiter les données pour améliorer les propositions de valeur.
Les gens devront avoir le contrôle de leur empreinte numérique afin de minimiser les risques tout en profitant pleinement des nouvelles possibilités. Certains tenteront de contrôler leurs données ou de créer des zones d’ombre numériques pour éviter le regard des médias sociaux. Les zones d’ombre pourraient être controversées vu qu’elles sont des destinations naturelles d’activités criminelles et requerraient une confiance mutuelle entre les usagés pour les garder dans l’ombre. Mentir pourrait devenir plus difficile et un plus gros faux pas. Les agents IA personnels pourraient utiliser les données de multiples sources pour détecter un mensonge en une fraction de seconde. Les appareils portables personnels saisissant des données personnelles présentent un grand potentiel de motivation. Cependant, vivre dans une société où les individus se comparent constamment pourrait devenir débilitant, encourageant la jalousie et la dépression. Les agences de publicité et les assureurs ont déjà commencé à innover en ce qui a trait à l’utilisation de renseignements personnels. La vie privée pourrait devenir un luxe trop dispendieux pour plusieurs. Cela dit, le fait de vivre dans un monde transparent est-il nécessairement une mauvaise chose?
« Conditions d’utilisation; Je n’ai pas lu »
tosdr.org est une initiative dont l’objectif est d’évaluer les conditions et les politiques de confidentialité de différents sites web. De simples notes pourraient permettre aux utilisateurs de mieux gérer leurs renseignements personnels. Voici quelques exemples de notes issues de tosdr.org :
SoundCloud : B Google : C YouTube : D
ALIBI.
discoveralibi.com propose une nouvelle application qui enregistre en continu, à l’aide de votre téléphone intelligent, les données audio, vidéo et de localisation de la dernière heure de votre vie, vous donnant ainsi l’alibi dont vous pourriez avoir besoin.
La réputation après l’oubli
Le déclin de la vie privée entraîne un phénomène connexe d’une importance croissante, celui des historiques et des réputations en ligne qui façonnent le parcours de vie de chacun.
Les gens réalisent peu à peu que tout le monde peut voir leur empreinte numérique. En réaction à cette réalité, des lois sont adoptées pour protéger les citoyens, notamment grâce au droit à l’oubli. Par ailleurs, de nouveaux outils sont développés pour informer les enfants tout comme les adultes sur la façon d’utiliser les médias sociaux en toute sécurité. Déjà, l’absence d’empreinte numérique est considérée comme un signal d’alarme indiquant que les médias sociaux sont désormais un moyen d’établir un certain crédit social. Cela pourrait favoriser l’utilisation de véritables identités en ligne, réduisant la cyberintimidation et le trollage. Facebook a déjà mis en œuvre une politique de noms véritables. Les parents devront de plus en plus porter attention à l’empreinte numérique de leurs enfants et les aider à créer du crédit social au profit de leurs carrières professionnelles. Ceux qui désirent réinitialiser leur présence en ligne doivent savoir que les années supprimées les suivront toujours, soulevant des questions pour le reste de leur vie.
La réalité augmentée propose de superposer du contenu numérique au monde réel. Cela pourrait supprimer l’anonymat dont on bénéficie dans les centres urbains, là où l’on vit parmi des étrangers. La reconnaissance faciale pourrait supplanter la personne au profit des profils de médias sociaux, des casiers judiciaires et des vidéos embarrassantes. Cela pourrait remettre l’accent sur le caractère des personnes plutôt que sur leurs attributs superficiels. Les produits seront également pourvus d’étiquettes numériques faisant la promotion de toute information disponible sur la production, les origines et les mentions dans les médias. Des outils favoriseront l’harmonisation des convictions personnelles avec les habitudes d’achat. Les sociétés devront réévaluer la valeur de l’image de marque en fonction de la responsabilité sociale des entreprises dans un monde qui n’oublie plus. L’automatisation du rappel de l’information transformera la vie urbaine moderne, entraînant peut-être l’avènement de quelque chose s’apparentant à un village numérique mondial.
La vérité dans une économie de l’attention
L’accès à un flux infini d’information pourrait renforcer le biais en faveur de la confirmation, les publications devenant de plus en plus décentralisées.
Les créateurs de contenu et les annonceurs cherchent de nouvelles façons d’apparaître sur nos écrans, la plus convoitée aujourd’hui étant l’écran d’accueil d’un appareil mobile. On ne peut qu’imaginer les recettes publicitaires qui pourraient être générées à partir d’annonces superposées par-dessus la réalité physique, intégrées au contenu affiché par des dispositifs de réalité augmentée. Les créateurs de contenu devront trouver de nouvelles façons de rejoindre leurs publics, souvent en convainquant les éditeurs de contenu (humains ou autonomes) des bons attributs de leur produit. Le résultat net pourrait être les échanges à haute fréquence d’évaluations, d’espace publicitaire, de recommandations et d’autorisations, soit une nouvelle économie de l’attention à haute vitesse. Si certains éditeurs de contenu tentent de rejoindre de plus grands publics, d’autres essaient peut-être de contourner le mur à péage ou la publicité. Si l’on se fie aux batailles juridiques précédentes liées à la piraterie et au blocage de contenu, l’intégration et l’évitement de publicités pourraient continuer à être difficiles, voire impossibles à contrôler. Cela laisse à chacun la tâche de donner sens à un paysage informationnel qui évolue rapidement. Avoir recours à un agent IA personnel pourrait soit permettre d’y voir plus clair, soit générer un torrent de désinformation en apparence crédible. Les écarts existants au niveau de l’éducation, de la richesse et de l’alphabétisation numérique pourraient devenir excessifs, certaines personnes manquant d’information pour comprendre les nouveaux dangers numériques, et d’autres cherchant activement de l’information pour renforcer leurs croyances existantes.
Réduire le fossé numérique
Le marché mondial numérique de l’emploi nécessitera un apprentissage continu et ceux qui en sont incapables ou qui refusent de s’y adapter risquent d’être laissés derrière.
La Société avertie présente une facilité d’utilisation du contenu numérique qui est transformatrice. La co-création, l’externalisation ouverte, et les centaures (équipes mi-humaines mi-AI) transforment les compétences dont on a besoin pour être concurrentiel dans bien des domaines. Nombreux seront ceux qui, sous la pression de l’économie créative et de l’automatisation, repenseront leur rôle dans une économie où les tâches inférieures seront automatisées. Il suffit de googler; l’apprentissage par cœur (la mémorisation par la répétition) devient presque obsolète une fois l’oubli essentiellement éliminé. Il faut donc réinventer l’éducation.
Ceux qui sont prêts à adopter de nouvelles méthodes d’apprentissage acquerront un avantage considérable grâce aux nouvelles technologies améliorant la cognition, aux nouvelles approches pédagogiques ou à la simple augmentation de leur capacité d’explorer les contenus pertinents. Les mobiles de présentation, le partage convivial d’écrans et les programmes AVEC (apportez votre équipement personnel de communication) tendent à supprimer les barrières technologiques dans les salles de classe et au travail. Une fois les simples difficultés techniques surmontées, la réalité augmentée immersive ressemble à une visite au musée, alors que les appareils à écran nous rappellent la lecture d’un livre. Dans le même ordre d’idées, la barre de recherche nous permet de parcourir rapidement la bibliothèque, alors que l’agent IA personnel nous permettra d’explorer la bibliothèque comme si nous étions accompagnés par le bibliothécaire.
Ces avantages ne seront toutefois pas exploités également. Aujourd’hui, Internet offre un contenu légèrement différent pour les ordinateurs de bureau, par rapport aux appareils mobiles. La réalité augmentée et les agents autonomes pourraient creuser l’écart technologique, excluant d’expériences d’apprentissage enrichissantes les personnes qui continuent à utiliser les dispositifs traditionnels. L’exposition à ces nouvelles technologies pourrait cependant entraîner des effets néfastes sur la santé. L’alphabétisation numérique pourrait devenir aussi importante que les mathématiques dans l’enseignement obligatoire, et apprendre à apprendre deviendra l’aptitude la plus importante de toutes. Les personnes, les familles voire la société en général devront transformer leur rapport à l’apprentissage et l’intégrer au quotidien.
Techno… philie, phobie et phrénie
Les technologies émergentes pourraient être source de discorde, puisqu’elles pourraient créer de grands clivages dans certaines sociétés.
Lorsque Google a commencé à mettre ses lunettes Google Glass à l’essai, le terme Glasshole est apparu pour signifier la peur et l’irritation associées à la surdocumentation et à la perte de vie privée. Bien que ces lunettes n’aient pas été mises en marché, prendre des égoportraits (selfies) et partager des moments sur les médias sociaux constituent la nouvelle norme pour plusieurs. Le désengagement vis-à-vis à de telles pratiques peut devenir un handicap sur le marché du travail numérique. Inversement, devenir un obsédé de la technologie peut être tout aussi débilitant. On a rapporté d’innombrables cas de personnes qui se sont perdues dans la réalité virtuelle en oubliant souvent l’importance du monde réel. La réalité augmentée immersive pourrait être beaucoup plus hypnotisante, aggravant possiblement les problèmes sociaux liés à la dépendance numérique. Les médias sociaux, tels qu’ils existent aujourd’hui, peuvent être une source d’isolement personnel en diminuant la capacité de s’engager dans des relations affectives significatives. Les amis Facebook peuvent devenir une façon de remplacer les amitiés de la vie réelle, certaines personnes allant jusqu’à combler leur besoin de compagnie avec l’intelligence artificielle ou la robotique. La réalité diminuée offre la possibilité de supprimer des parties indésirables du monde réel, aliénant peutêtre encore davantage les gens des réalités de leur société.
Plusieurs utilisent cependant avec succès les technologies numériques pour se forger de profondes relations virtuelles. Ceux qui sont entièrement adeptes des nouvelles possibilités de la Société avertie pourront se fondre dans une immersion totale et constante. Cette nouvelle forme de relation permet à certaines personnes (ou groupes) d’être aussi inséparables que des jumeaux siamois tout en étant géographiquement éloignées. Les personnes utilisant l’IA pour se rappeler des dadas ou des faux pas des autres ou des expériences partagées avec eux, peuvent passer pour des surhumains ou transhumains aux yeux de ceux qui rejettent la technologie. Numériquement immergées, ces personnes seront moins nombreuses au début, mais deviendront probablement la majorité. La période de transition risque fort de perturber les normes sociales et l’étiquette entourant l’utilisation de téléphones intelligents n’est que la pointe de l’iceberg.
Usage problématique d’Internet (UPI)
« Environ 1 % de la population adulte peut être atteint d’un trouble UPI limité ou “grave”, alors que de 4 % à 14 % peut avoir des problèmes d’utilisation excessive d’Internet ».
Non-substance-addictive behaviors in youth
Brezing, Derevensky et Ptenza
http://youthgambling.mcgill.ca/en/PDF/Publications/2010/non-substance.pdf
Conclusion
Dans une Société avertie, les personnes exploitent la puissance de nouvelles technologies pour naviguer aisément dans un océan d’information en pleine expansion. L’intelligence artificielle (IA) organise l’information provenant de diverses sources et agit en notre nom. L’information est ainsi souvent présentée sans qu’on la demande. Connectivité omniprésente et traduction automatique en direct élargiront l’expérience des cultures du monde. Les personnes pourraient voir leurs agents IA rencontrer de nombreux autres agents, médiatisant de nouvelles connexions et optimisant les expériences sociales. La société est transformée en un réseau plus complexe d’interactions dans lesquelles la vitesse et la direction de l’action collective humaine évoluent d’une manière inattendues.