La fragmentation et la résurgence des groupes terroristes Islamistes en Asie

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PDF: La fragmentation et la résurgence des groupes terroristes Islamistes en Asie

Sur cette page

Où en sont les choses?
Pourquoi s’agit-il d’un enjeu important?
Comment l’Asie sera-t-elle concernée?
Comment le Canada sera-t-il concerné?
Références

Où en sont les choses?

Les modalités et l’ampleur du terrorisme islamiste ont évolué, et les effets se font sentir en Asie. Dans la période qui précède et qui suit directement les attaques du 11 septembre 2001, les groupes terroristes se sont investis dans des opérations à grande échelle visant surtout des cibles internationales. Néanmoins, la réponse contre-terroriste a entraîné une fragmentation des groupes terroristes, entravant leur capacité à lancer des attaques de grande envergure. Cela ne signifie pas pour autant que le terrorisme soit enrayé. Au contraire, les opérations terroristes sont devenues plus localisées, ciblant fréquemment les minorités religieuses et les autorités locales. De plus en plus, les groupes terroristes sont rattachés à des éléments criminels. La réussite des groupes terroristes dans les conflits afghan et syrien pourrait entraîner une recrudescence des attaques et une prolifération des activités terroristes vers de nouveaux points chauds.

Pourquoi s’agit-il d’un enjeu important?

Alors que divers groupes terroristes demeurent actifs en Asie, le terrorisme islamiste représente une source commune d’instabilité dans plusieurs pays asiatiques. L’Asie du Sud, l’Asie de l’Est et l’Asie du Sud Est représentent plus de 75 % de la population musulmane mondiale, ce qui rend les pays de cette région particulièrement sensibles à l’évolution des modes d’organisation et d’opération des groupes terroristes islamistes.

Il est important de comprendre la trajectoire des activités terroristes en Asie étant donné que l’évolution des modalités et de l’ampleur du terrorisme présente de nouveaux défis politiques. Les initiatives de lutte contre le terrorisme ont été un moyen efficace de déstabiliser des groupes bien organisés en Asie, mais la localisation des cibles pourrait nécessiter d’aborder la prévention du terrorisme de façon innovatrice en faisant participer les autorités infranationales.

Comment l’Asie sera-t-elle concernée?

  • L’augmentation des activités criminelles : Le renforcement des capacités de lutte contre le terrorisme a petit à petit réduit la capacité des groupes radicaux à organiser et à mener leurs opérations. En Asie du Sud Est, de nombreux chefs de l’autrefois discipliné Jemaah Islamiyah ont été emprisonnés, exécutés, ou tués au combat. En Asie du Sud, des opérations militaires américaines continuent de « décapiter » des groupes radicaux en éliminant leurs chefs. Le vide qui en résulte à la tête de ces organisations a causé bon nombre de fragmentations et de décentralisations. En conséquence, l’effondrement de la discipline et des mécanismes de financement a incité plusieurs groupes à se tourner vers le crime à la fois dans leurs activités et dans le genre d’individus recrutés. Aux Philippines, Abu Sayyaf fut l’un des premiers groupes à adopter ce revirement entrepreneurial en élargissant ses opérations d’enlèvement. En Indonésie, des groupes terroristes sont soupçonnés d’avoir commis de nombreux cambriolages récents. Les organisations plus puissantes au Pakistan et en Afghanistan se livrent aussi à des activités d’extorsion et de trafic de drogue.
  • La localisation de la violence : Lorsqu’ils étaient soumis à la forte influence d’Al-Qaïda, l’attention de groupes radicaux était principalement dirigée vers « l’ennemi lointain », c’est-à-dire les États Unis et l’ensemble du monde occidental. Un équilibre entre leur présence dans les conflits locaux et l’objectif stratégique de frapper des cibles étrangères était ainsi maintenu. Les ripostes efficaces menées par les services de sécurité ont affaibli ces capacités, surtout en Asie du Sud Est. La fragmentation a produit une multiplicité de groupes qui emploient des tactiques indépendantes et qui se font parfois concurrence. Les opérations sont devenues plus locales et de faible envergure, les principales victimes étant bien souvent les minorités religieuses ainsi que les forces de l’ordre. Par exemple, les radicaux d’Indonésie ne partagent pas le même avis quant à la distinction entre les assassinats bien fondés et les opérations martyres. Les représentants chargées de faire respecter la loi ont été ciblés, et l’on soupçonne une implication terroriste dans une récente série de meurtres de policiers à Jakarta. En outre, la violence localisée à l’encontre de minorités religieuses devient de plus en plus commune. De même, au Pakistan, certains groupes collaborent avec les services de sécurité tandis que d’autres leur font la guerre. Les Shiites et les Chrétiens pakistanais sont de plus en plus la cible de campagnes d’attentats à la bombe.
  • La diffusion des connaissances et des tactiques : Le succès rencontré par les groupes extrémistes en Syrie et en Afghanistan pourrait conforter les activités radicales en Asie du Sud et du Sud Est. La convergence de combattants étrangers en Syrie permet à des groupes disparates d’entraîner des soldats et de préparer des opérations internationales, et l’on affirme que des membres de l’ethnie ouïghour en Chine auraient combattu en Syrie. Il n’est pas clair que des sud-est asiatiques aient participé directement aux combats en Syrie, mais le réseau international issu de ce conflit servira de ressource pour les groupes radicaux qui ambitionneraient de se former dans la région. Qui plus est, la réduction progressive des troupes de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en Afghanistan signifie que de nombreux anciens combattants en Asie du Sud seront à la recherche d’une nouvelle mission et, que le Pakistan, assiégé, ne sera pas en mesure de les tenir en échec. L’influence déstabilisatrice de ces deux facteurs renforcera les capacités des groupes terroristes et remontera le moral de leurs membres.
  • Les nouveaux points chauds : Alors que l’attention se détourne de la Syrie et de l’Afghanistan, de nouvelles zones de conflit pourraient faire leur apparition. Les autorités chinoises attribuent les récentes attaques perpétrées localement à l’influence et aux connaissances des vétérans ouïghours impliqués dans le conflit syrien. On note également un risque préoccupant de radicalisation au Myanmar, où les tensions entre la minorité musulmane et la majorité bouddhiste s’intensifient. La situation au Myanmar a déjà suscité une aggravation de la violence en Indonésie. Notamment, un individu radicalisé a récemment été accusé d’avoir planifier un attentat à la bombe à l’ambassade du Myanmar, et des temples bouddhistes ont été la cible d’actes de vengeance.
  • Le renforcement de la coopération internationale : Le nouveau contexte de menace va probablement encourager les États à accroître le nombre d’opérations concertées de lutte contre le terrorisme. L’Indonésie a récemment accueilli un exercice d’entraînement mené par l’Association des Nations de l’Asie du Sud Est (ANASE) + 3. La Chine noue des relations avec des partenaires clés, et mène des exercices d’entraînement avec le Pakistan, l’Inde et l’Indonésie. Le renforcement de la coopération entravera la capacité des terroristes à préparer et à mener des opérations de grande envergure.

Comment le Canada sera-t-il concerné?

Le Canada est activement impliqué dans le renforcement de ses capacités antiterroristes en Asie. À cette fin, il établit des liens multilatéraux avec des groupes régionaux tels que l’ANASE et intensifie l’aide bilatérale apportée au front, avec des pays tels que la Thaïlande et l’Indonésie. Les tendances du terrorisme asiatique pourraient avoir de nombreuses répercussions sur le Canada. L’attention des terroristes sera détournée loin des cibles occidentales par la localisation des attentats et le recours au financement criminel, ce qui rendra les Canadiens à l’étranger moins susceptibles d’être visés. Toujours est-il qu’à long terme, les vétérans de conflits extrémistes – notamment ceux qui ont combattu en Afghanistan – pourraient envisager de frapper des cibles canadiennes en Asie du Sud.

L’évolution de la forme du terrorisme islamiste a des incidences politiques supplémentaires pour les stratégies de lutte contre le terrorisme. Le Canada ainsi que d’autres pays donateurs ont concentré le renforcement des capacités antiterroristes sur les organismes nationaux. Alors que les terroristes orientent leurs cibles vers les minorités et les autorités locales, il deviendra important de renforcer les capacités antiterroristes au niveau infranational.

Références

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